29ème colloque du CREEAD 27 juin 2024

Intelligence artificielle, entre Innovation et régulation

En 1920, Valery Larbaud fit connaître en France l’écrivain britannique, Samuel Butler, grâce à la traduction de son roman, Erewhon (1872). Entre utopie et dystopie, Erewhon anticipe nos débats sur l’intelligence artificielle en voyant dans les machines une nouvelle forme d’intériorité et de conscience, laquelle interroge l’évolution de l’intelligence dans une perspective darwinienne : « pourquoi donc alors ne pourrait-il pas se produire une nouvelle phase de l’esprit qui serait différente de toutes les phases jusqu’ici connues ? » [.......] Ce trait dystopique est radical, il invite pourtant à réfléchir à l’innovation et à nos modèles contemporains de croissance économique, en matière d’intelligence artificielle. Les craintes qui concernent les mutations des métiers (et la notion de travail elle-même) sont-elles fondées ? Dans quelle mesure l’imagination, « reine de nos facultés » selon Baudelaire, est-elle dangereusement concurrencée par les algorithmes de la super-intelligence, notamment dans les secteurs de la création et de l’éducation ?

Une telle mise à l’épreuve des théories schumpetériennes implique, en même temps, une approche inventive de la régulation. Si le recours à des instruments juridiques contraignants est nécessaire et légitime, il importe aussi d’envisager des démarches volontaires de responsabilisation de toutes les parties prenantes. La réponse à la dystopie d’Erewhon serait dès lors le développement harmonieux d’une culture de la responsabilité, en vue d’instaurer de bonnes pratiques. C’est dans ce cadre, certes très général, qu’il convient de dégager une éthique de l’intelligence artificielle, capable de rétablir la confiance entre les technologies de l’algorithme, sans cesse innovantes, et l’ensemble de la société.